Le premier “BricàBracoPhilo” : sur le thème de la banlieue le 16 décembre à 10h30
La banlieue est un bel exemple de la pensée « bricabracante ».
Tout d’abord, elle semble ne pas être un objet philosophique, ou être un objet simplement mineur pour la réflexion philosophique traditionnelle : elle apparaît alors comme un de ces objets hétéroclites ! Elle est diverse dans sa configuration et sa population mais aussi définie par sa diversité à un point tel qu’elle est un des lieux symbolique de l’hétéroclite. Et pourtant elle semble aussi le lieu de l’uniformisation et de la standardisation de la vie ! Elle possède des définitions multiples et ambiguës dont l’unification est mal assurée ! Ensuite, si l’on ajoute à la définition du bricolage qu’il se définit par un « abandon déclaré de toute référence à un centre » (comme le dit Jacques Derrida à propos de Lévi-Strauss), voilà un rapprochement et un réarrangement de l’idée de la banlieue possible : la banlieue s’est construite et définie à partir de la référence au centre, au fondement d’un pouvoir central ou du pouvoir central de la ville (et la banlieue parisienne encore davantage puisque Paris est le lieu central du pouvoir centralisateur de l’Etat français), mais avec son extension, elle produit un décentrement qui déconstruit la ville en retour !
La banlieue, périphérie du centre, est centrale ! Par la question de la banlieue se déclare la question de la ville ou de la cité, c’est-à-dire la question de la politique et de la démocratie : « La question d’une politique démocratique de la ville doit toujours commencer par la grave question : Que veut dire banlieue ? » (Jacques Derrida, Voyous). Située aux limites des villes, elle étend la ville sans limite ! Promise à une intégration dans la ville, elle a désintégré la ville dans son extension indéfinie. Sans origine déterminée, elle est pourtant aujourd’hui assignée aux origines sociales ou ethniques ! Sans limite, et donc sans identité limitée, elle renvoie aujourd’hui à la question de l’identité et de l’identitaire ! Tout d’abord dépendante de la ville, juridiquement comme démographiquement, la banlieue a rendu la ville dépendante d’elle pour ses activités. Lieu de relégation ou de bannissement, elle est aussi un lieu de richesses et de vie. Mais de quelle forme de vie ? « La pulsion d’enracinement » est-elle contrariée par la dispersion, l’extension ou l’illimitation de la banlieue ?
La banlieue est traversée par des contradictions multiples qui font d’elle un objet philosophique potentiel, mais elle est aussi un lieu où philosopher ensemble : la banlieue est non seulement un thème possible de la réflexion philosophique mais aussi le lieu depuis lequel la philosophie peut s’élaborer dans un cadre hétérogène, dans le cadre décadré du Bric-à-Brac où nous réfléchirons ensemble le 16 décembre 2017 de 10h30 à 12h00.
Vincent Houillon
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